Science et Religion

Prof. Adrian Lemeni, Cosmologie biblique et liturgique chez les Pères

Cosmologie biblique et liturgique dans la  pensée des Pères de l’Eglise.

La relation entre la Révélation naturelle et celle surnaturelle

La Tradition orthodoxe ne fait pas de séparation entre la Révélation naturelle et la Révélation surnaturelle. Il n’y a pas de naturel pur, car le naturel est fondé et structuré par le surnaturel. Sous l’influence d’une vision dualiste, on a promu une théologie exclusiviste qui favorisait une perception séparatiste et fragmentaire de la Révélation. On peut parler toutefois d’une Révélation naturelle et d’une autre surnaturelle, car la Révélation surnaturelle met en lumière et rend plus claire et explicite la Révélation naturelle. D’une part, l’homme et le cosmos sont des réalités du monde naturel, donc des composantes de la Révélation naturelle. D’autre part, tant la rationalité du cosmos que la raison humaine sont déterminées et récapitulées par la raison suprême, le Verbe Christ qui est l’Archétype et le Telos de toute la création.

Les sens de l’existence naturelle, si évidents qu’ils soient, ne s’imposent pas par une méthodologie de type positiviste, instrumental, qui identifie empiriquement et qui, éventuellement, mesure ces sens. L’acception des sens du monde suppose une compréhension supérieure qui implique la réalité de la foi. La Révélation surnaturelle représente un rétablissement de la nature humaine dans son état authentique, en lui donnant en même temps la force d’atteindre le but final, auquel elle aspire tout naturellement. Ainsi, la Révélation surnaturelle manifeste et parachève la véritable identité de la Révélation naturelle.

Entre la Révélation naturelle et la surnaturelle il y a une convergence. Dieu parle autant à travers la grandeur de la nature que dans l’histoire du salut. (Ps 18, 1-4; Job 33, 14-26). Mais la Révélation surnaturelle précise le but de la révélation naturelle et les modalités pour l’atteindre. A la lumière de la Révélation surnaturelle, les chrétiens observent la manière dont Dieu les guide à travers les choses et les évènements bons ou mauvais de leur vie, par le moyen de leur propre conscience ou de leurs idées, vers une communion avec Lui de plus en plus vive et profonde.

C’est en Christ que cette communion se réalise pleinement, puisque c’est en Lui que s’accomplissent tous les sens de la création, le Christ étant le fondement de la véritable union entre Dieu et l’homme. Dans le contexte de la Révélation surnaturelle, le caractère personnel de Dieu ressort avec plus d’évidence, de même que le fait que le lien entre Dieu et l’homme se fonde sur des relations interpersonnelles. Le fait d’approfondir la relation personnelle avec Dieu et de prendre conscience de l’existence de Dieu comme d’une communion parfaite entre les Personnes divines, conduit à une manière de vivre plus authentiquement les relations interhumaines.

La relation interne entre la Révélation naturelle et celle surnaturelle montre que la création tout entière (homme et cosmos) est amenée à l’existence, soutenue et parachevée par le même Dieu unique. La tentative d’expliquer la réalité du monde et de l’homme en excluant Dieu est une grande erreur.

Afin de mettre encore davantage en évidence la supériorité de la personne sur la nature, Dieu Se fait connaître dans la Révélation surnaturelle aussi par des actes surnaturels, qui ne peuvent pas être identifiés à des phénomènes naturels. Mais un acte surnaturel n’abolit jamais le naturel, il le transfigure. L’histoire du salut est jalonnée par bien d’actes surnaturels, mais ceux-ci ne montrent que la vocation ultime de la création : d’être transfigurée en Christ.

Tant par les périodes nouvelles qu’ils inaugurent que par les perspectives qu’ils ouvrent vers le but final, les actes de la révélation surnaturelle et les paroles qui les expliquent ont un caractère prophétique. Le Christ accomplit la Révélation surnaturelle (He. 1,1), mais cela ne signifie pas une vision statique de la révélation, puisque nous sommes tous impliqués dans l’histoire du salut, étant appelés à nous assumer les fruits de la victoire du Christ sur le péché et la mort. C’est à ce sens qu’il y a une dynamique de la Révélation et non qu’il y aurait quelque chose de supérieur au Christ.

La dynamique et l’actualisation de la Révélation ne signifient pas un renoncement aux actes constitutifs du christianisme, au langage spécifique à l’expérience ecclésiale. L’actualisation de la Révélation ne suppose pas une accommodation aux exigences de la logique de ce monde, aux théories d’une époque ou d’une autre. Assumer la conscience ecclésiale selon laquelle la théologie se fonde sur la Révélation est essentiel aussi dans la perspective de l’articulation d’un dialogue honnête et constructif entre la théologie et la science. Les exigences de la logique du dialogue ne supposent pas une adaptation de la Révélation à la capacité de la compréhension humaine, qui s’est avérée souvent impuissante devant le mystère du monde et de l’être humain.

 

La réciprocité dynamique entre l’homme et le cosmos, entre la rationalité du monde et la raison humaine

Dans la cosmologie contemporaine est mis en évidence le lien étroit entre l’homme et le monde, le fait que l’univers est créé pour l’homme. On y trouve formulé le principe anthropique qui précise que les variantes cosmologiques n’ont pas des valeurs arbitraires et que l’univers est fait de manière à permettre l’existence de l’observateur humain. Le principe anthropique est un principe de la complexité et de la cohérence, il révèle la cohérence du monde entier où tant l’homme que le cosmos sont des réalités assumées ensemble.

La perspective théologique dépasse les implications du principe anthropique, puisque le fondement et le sens de la création n’est pas la complexité de l’humanité en tant qu’évènement fondateur dans l’histoire du cosmos, mais le Verbe Créateur et Rédempteur de toute la création – Jésus Christ. La Tradition orthodoxe souligne la réciprocité entre l’homme et le cosmos, qui se fonde en Christ et s’accomplit par Lui. Une interprétation théologique du principe anthropique montre que le lien entre la perspective théologique et celle scientifique, à partir du principe anthropique, ne s’épuise pas entre les frontières de l’ordre exclusivement naturel.

L’intelligibilité de l’univers et la possibilité que le monde soit connu est dépourvue de sens en l’absence de la raison humaine. Seul l’homme, en tant que sujet connaissant, conscient de sa propre raison, peut, par la contemplation de la rationalité divine du cosmos, s’élever à la Raison éternelle et véritable, le Christ.

Entre Dieu-homme-monde il y a une interdépendance et l’homme approfondit la conscience de sa propre identité seulement dans la mesure où il assume de manière adéquate la rationalité du monde, mais le rôle de sujet revient à l’homme. Le monde est appelé à être transfiguré par la sanctification de l’homme et non inversement, que l’homme diminue sa personnalité en se fondant dans l’indéfini de la nature. De cette manière, l’homme travaille authentiquement sa vraie raison, entrant en communion de vie avec la Personne infinie.

La rationalité du monde et la raison de l’homme ne peuvent pas être les expressions d’une réalité absurde. Tant le sens de la rationalité du monde que celui de la raison humaine s’accomplit dans le mystère de la Personne suprême, Christ le Verbe, qui structure et parachève toute la création. « La rationalité de l’univers ne peut pas être absurde. Mais elle acquiert son sens plénier lorsqu’elle est considérée comme ayant sa source en une personne rationnelle qui s’en sert en vue d’un dialogue éternel de l’amour avec d’autres personnes. La rationalité du monde implique donc, pour s’accomplir, l’existence d’un sujet supérieur. Le monde comme objet n’est que le moyen pour un dialogue de pensées et d’actes aimants entre la personne rationnelle suprême et les personnes rationnelles humaines, et entre celles-ci aussi. L’univers porte la marque que lui confère son origine dans la personne créatrice rationnelle et sa destination d’être le moyen d’un dialogue interpersonnel entre cette Personne et les personnes humaines, afin que celles-ci demeurent pour l’éternité dans la joie de la communion entre elles. L’univers tout entier porte la marque d’une rationalité personnelle destinée à éterniser les personnes humaines. Ce n’est qu’en participant pour l’éternité à l’infinité de cette Personne suprême que notre être considère avoir accompli son sens »[1].

Les raisons des choses ne peuvent pas être épuisées par une connaissance discursive. La raison analytique n’examine que partiellement la réalité inépuisable de la rationalité du monde. Ce caractère inépuisable dérive du lien entre la rationalité du monde, la raison humaine et le Verbe divin. Les raisons divines du monde sont contemplées spirituellement par un esprit purifié des passions et éclairé par la grâce. En ce type de connaissance, l’intuition met en évidence une connaissance plus directe, au-delà du processus spécifique à la recherche analytique. Y compris dans des domaines de pointe de la science, on reconnaît les limites intérieures de la connaissance analytique. Ainsi est assumé le mystère du monde, qui ne peut être épuisé par une raison analytique.

La croix de la raison analytique est la vue spirituelle éclairée par la foi. L’effort spirituel sur le chemin de la foi n’abolit pas le potentiel de la raison analytique, mais le transfigure par l’intuition des sens toujours plus profonds, que la raison exercée analytiquement ne saurait contenir. Par la contemplation spirituelle de la rationalité du monde, se développe une connaissance unitaire du monde, qui met en évidence le sens commun de la rationalité de la nature comme de la raison humaine. Cela s’accomplit dans le sens plénier du Verbe Christ.

La raison analytique examine le monde par fragments et ses résultats sont toujours dépassés et intégrés dans des visions plus amples. Dans la perspective de la Tradition patristique, il y a une interdépendance entre la raison analytique et la contemplation. La capacité de saisir les raisons divines des choses suppose une contemplation qui permette l’intuition rapide du sens spirituel de ces choses. Mais la contemplation peut être le résultat d’un processus persévérant où la raison analytique est exercée sans répit. La contemplation apporte un plus de connaissance qui ne peut pas être capté et exprimé par des concepts. Les capacités de chercher et d’examiner les choses font partie de la nature humaine. C’est pour cela que la démarche de la raison humaine de chercher et d’exprimer la rationalité du monde est tout à fait naturelle.

Conscient que le monde est un don de Dieu, l’homme ne s’arrête pas au monde comme à la réalité ultime. Au contraire, en assumant spirituellement le monde, on actualise la dynamique ecclésiale de tout le cosmos et ainsi, par la création, deviennent transparentes les raisons divines des choses. Dans cette perspective, l’homme, par sa raison, ne considère plus la rationalité du monde comme étant exclusivement objective et neutre, mais la rapporte à la Source de la rationalité du monde et de la raison humaine, le Verbe Christ, la Raison suprême d’exister de toute la création.

La réciprocité et la relation sans confusion qui existe entre l’homme et le monde sont accomplies en Jésus Christ, le Fils de Dieu. L’homme, par l’expérience ecclésiale, transfigure le cosmos, en le personnalisant par sa présence spirituelle. L’univers personnalisé et marqué par l’unité sans confusion des humains rassemblés en Christ est récapitulé en Christ afin que Dieu soit aperçu à travers toute chose. A ce sens, le Saint Apôtre Paul affirme: « Et quand toutes choses lui auront été soumises, alors le Fils Lui-même sera soumis à Celui qui Lui a tout soumis, pour que Dieu soit tout en tous » (I Co 15, 28).

Les choses sont les raisons divines plasticisées et à ce sens elles représentent des paroles que Dieu adresse à l’homme. Ainsi, l’homme par sa raison scrute la rationalité du monde, apercevant les raisons divines des choses. Les hommes partagent et communiquent l’expérience de la rationalité du monde et des choses en tant que réalités plasticisées des raisons divines par le moyen des paroles. Dans cette perspective, l’homme répond à l’appel de Dieu, le monde étant un milieu du dialogue entre Dieu et l’homme. Chaque chose est une parole par laquelle Dieu s’adresse à l’homme, en attendant une réponse de sa part. La réciprocité entre la rationalité du monde et la raison humaine consolide et actualise en permanence la condition de l’homme d’être partenaire de dialogue avec Dieu.

 

L’herméneutique du texte de la Genèse: entre la contemplation spirituelle de l’esprit sanctifié et la justification de l’exercice analytique et discursif de l’esprit autonome

Une théologie de la création en perspective orthodoxe se fondera sur une herméneutique biblique et patristique, assumée dans l’esprit des Pères. Il ne nous est pas demandé tellement d’accommoder l’Ecriture aux derniers résultats de la science, mais plutôt de faire un effort pour purifier notre esprit afin de pouvoir être en parfaite continuité avec l’esprit des Pères. Il n’est pas besoin d’ajuster notre esprit aux exigences de ce siècle, mais de nous efforcer d’acquérir l’esprit du Christ. En état d’impureté, on ne peut pas approcher les Saintes Ecritures. Seul un esprit soumis à la metanoia, transformé par le Saint Esprit, peut avoir accès à la contemplation spirituelle du monde. Seuls ceux habitués à avoir l’esprit du Christ peuvent communier à la profondeur des mystères de la création.

La connaissance la plus sûre est celle qui ne se fie pas à la force de ses propres réflexions. Saint Jean Chrysostome dit que, si quelqu’un affirme connaître la hauteur du ciel, il se leurre, tandis que lorsqu’il avoue son ignorance à ce sujet, il est plus proche de la vérité, car ces hauts dogmes concernant la création ne doivent être reçus que de la part des Saints Pères. “C’est pour cela que nous devons recevoir avec foi inébranlable et en les demandant à ceux expérimentés les dogmes de l’Eglise et les sages opinions des maîtres sur les divines Ecritures et sur les êtres sensibles et intelligibles, sans nous fier à notre perspicacité, pour ne pas choir aussitôt. En tout, nous devons découvrir notre ignorance, de sorte que celui qui cherche et ne fait pas confiance à ses pensées se mette à vouloir apprendre davantage, et sans avoir beaucoup de science, connaître son ignorance par la sagesse sans bornes de Dieu ”[2].

Il n’est pas facile de nos jours (même pour quelqu’un accoutumé aux Ecritures et aux Saints Pères) d’aborder le récit de la Genèse en tenant compte des schémas mentaux imposés par la science contemporaine. Tant les sciences exactes (physique, astronomie, cosmologie scientifique) que les sciences biologiques, dans la plupart des conceptions élaborées, imposent l’évolution cosmique comme une loi qui gouverne l’univers tout entier en partant des particules matérielles les plus insignifiantes jusqu’à l’homme. L’homme est considéré comme une évolution de la nature, un résultat de l’acquisition par la nature de la conscience de soi. La philosophie présente l’homme comme un être à la recherche de son propre moi, l’horizon de la recherche restant au niveau de la créature.

En perspective chrétienne, tant l’homme que le cosmos s’expliquent et se justifient par Dieu. Ce n’est qu’à partir de Dieu que l’on peut pénétrer dans les mystères de l’homme et de l’univers. Ce n’est pas un christianisme accommodé aux exigences du naturalisme contemporain qui nous éclairera en matière d’anthropologie et de cosmologie, mais le christianisme qui met Dieu au centre et qui part de Dieu pour comprendre l’homme et le cosmos.

Il est clair que le récit de la Genèse ne se réfère pas à un monde connu grâce aux lois naturelles analysables par une méthodologie scientifique. Le langage de la Sainte Ecriture est iconique. Les noms donnés aux réalités présentées dans la Genèse désignent un tout. Lorsqu’on lit “Au commencement, Dieu créa le ciel et la terre”, on doit avoir en vue l’intégralité de la création. Il s’agit d’un état au-dessus du temps décelable par des instants tel que nous le connaissons aujourd’hui, lorsque le Dieu pensa la création.

Mais, pour Dieu, penser c’est déjà faire (même si la comparaison est bien faible, on peut penser au projet d’une œuvre qui signifie déjà création). C’est pour cela que Moise, le prophète emploie le verbe « a fait ». Saint Grégoire de Nysse montre qu’en hébreu, l’expression « au commencement » signifie aussi « en général », c’est-à-dire on pourrait comprendre que Dieu, dans Son conseil en ce temps d’avant le temps, a tout pensé (a fait) d’un coup (voir aussi chez Saint Basile ce « quelque chose » qui existe avant le ciel et la terre, cet état au-dessus du temps où Dieu a tout fait).

Une est la création dans le pré-temps, pensée par Dieu dans le divin conseil trinitaire, et autre est la création dans l’acte de Dieu, le développement de la création au long des six jours. Ces jours non plus n’ont pas de rapport avec le temps naturel, connu par les moyens spécifiques à la science. Il s’agit d’un temps primordial, sacré, que les religions du monde pressentent, mais qui ne peut pas s’identifier au temps biologique. C’est à ce sens que l’on peut parler d’une distinction entre cosmogonie et cosmologie.

La parenté entre la création et l’homme ne signifie pas que l’homme serait une expression ultime du processus évolutif de la nature. L’homme est d’emblée un être intégral et se distingue du monde par ce qu’il reçoit directement le souffle divin de vie. L’intégralité et le spécifique de la personne humaine proviennent de ce souffle. L’image de Dieu se reflète dans l’homme. La nature a, elle aussi, une image de création de Dieu, mais l’univers voit Dieu à travers l’homme. L’homme a la vocation de personnaliser le cosmos tout entier, d’élever de plus en plus l’image de création divine jusqu’à l’image divine intégrale existante en l’homme.

Dans l’intégralité de la création de la phase pré-cosmique, où tout l’univers est structuré selon l’archétype christique, les modèles du monde ne sont ni spirituels, ni matériels, mais iconiques. De même que le Christ ait la capacité d’être l’Icône du Père (Il est l’Image du Père) et l’homme, l’image du Fils (image de l’Image), il y a aussi les paradigmes du monde comme tout autant d’images toujours du Fils. Et, si le Fils est icône, alors ces images sont elles aussi iconiques.

Nous sommes habitués à parler plutôt des raisons divines selon lesquelles ont été créées les choses du monde. Père Stăniloae parle des raisons plasticisées de la création comme des hypostases des raisons divines archétypales. Mais, si l’on pense à ces raisons divines archétypales comme à des images christiques de la création, comme à des modèles iconiques, on peut mieux saisir la capacité du monde d’être personnalisé, d’être engrenée dans la relation de filiation existante entre Dieu et l’homme.

La réalité intégrale ne suppose pas une exclusivité ni du spirituel ni du matériel, mais la complexité iconique. C’est dans cette perspective que l’on doit accepter que le langage scripturaire présentant le récit de la Genèse est un langage iconique. La théologie non plus ne doit pas comprendre ces paradigmes de la création comme étant exclusivement de nature spirituelle, mais ni la science ne doit pas se fixer de manière obsessive sur le matériel.

Moise, quoique formé dans les hautes écoles d’Egypte, ne se sert pas, en décrivant la création du monde, des connaissances acquises en ces écoles. Les Egyptiens croyaient qu’à l’origine du monde se trouvent les esprits, les dieux du ciel, qui créent le monde d’ici-bas, l’homme y compris. Moise exclut de l’acte de la création du monde tant les anges que les forces de la nature, pour que la puissance divine ne soit pas confondue avec la puissance naturelle. La vie est donnée exclusivement par la valeur de l’acte créateur de Dieu. Cette vision est spécifique à la Sainte Ecriture, ne se confond à aucune autre conception mythologique, philosophique ou religieuse et il est inadmissible qu’elle soit altérée sous le prétexte d’une interprétation scientifique du récit de la Genèse.

Les textes de la Genèse sont inspirés par Dieu, ne sont pas produits par la spéculation humaine. Il y a des voix qui affirment que Moise aurait rédigé la Genèse en se fondant sur des textes cosmogoniques plus anciens qu’il connaissait et sur des informations provenant de la Tradition orale. Mais les Saints Pères soulignent que le véritable auteur du texte révélé est Dieu, Moise n’étant que celui auquel Dieu a révélé ce texte.

Moise ne fut pas un simple prophète, mais celui qui, avant le Christ, a vu Dieu tant qu’il est possible à un humain de Le voir. La Sainte Ecriture nous dit: “S’il y a parmi vous un prophète, c’est par une vision que Moi, le Seigneur, Je me fais connaître à lui, c’est dans un songe que Je lui parle ; il n’en va pas de même pour Mon serviteur Moise, lui qui est Mon homme de confiance pour toute Ma maison ; Je lui parle de vive voix – en me faisant voir – et non en langage caché ; il voit la forme du Seigneur ”(Nb 12, 6-8).

Au moment de nous approcher du mystère de l’origine de notre existence relatée par Moise, le prophète, dans le livre de la Genèse, on doit le faire comme il se doit, avec une profonde humilité et bien conscients que nous ne pouvons pas pénétrer le mystère des divines paroles par la force de notre recherche. Pour saisir le sens véritable des choses révélées, il faut laisser de côté tous nos préjugés, nos conceptions et nos théories au sujet du commencement et de la fin du cosmos, et nous efforcer d’intégrer le message biblique dans un schéma mental propre.

Il est impérativement nécessaire de renoncer à nos propres opinions ou tentatives qui cherchent à légitimer à l’aide de la Sainte Ecriture notre vision sur le monde. Pour cela, il nous faut acquérir l’humilité par des efforts ascétiques qui nous permettent de nous laisser, nous, énoncés par la Tradition vivante des Saints Pères et non de nous servir des Saints Pères comme d’un bouclier qui justifie notre discours personnel. Une approche convenable du texte révélé du livre de la Genèse nous oblige à une attitude pieuse qui ne cherche pas à satisfaire la curiosité par un travail spéculatif épuisant, mais qui favorise l’effort ascétique de purification de l’esprit pour pouvoir contempler avec les yeux spirituels les mystères cachés dans le texte divin. Ce n’est pas en vertu de la connaissance humaine que Moise énonce le texte de la Genèse, mais par inspiration divine.

Pour ces raisons, Saint Jean Chrysostome exige que l’on renonce à ce qui est nôtre pour être en mesure d’accueillir ce qui vient de Dieu : “Je vous prie donc de prêter attention à ce qui est dit non comme si cela venait de la bouche de Moise, mais du Dieu de l’univers par la bouche de Moise. Disons adieu à nos pensées. Accueillons avec gratitude les paroles de l’Ecriture ; ne dépassons pas notre mesure, mais ne nous mêlons pas à ce qui est au-dessus de nous, comme ont fait les ennemis de la vérité qui, voulant tout examiner par leurs propres pensées, n’ont pas compris qu’il est impossible à l’homme de connaître pleinement la création de Dieu. Mais pourquoi parler de la création de Dieu? On ne peut connaître ni même les choses sorties des mains de l’homme … Si tu ne peux pas connaître les choses que l’on a devant les yeux et qui sont faites par la maîtrise humaine, grâce à l’amour de Dieu pour les hommes, comment pourrais-tu connaître parfaitement ce que Dieu a créé? Comment pourrais-tu te faire pardonner? Que dire à ta défense, puisque tu es assez fou de t’imaginer ce qui est plus haut que ta nature?”[3]

La précision du livre de la Genèse n’est pas de facture scientifique, mais spirituelle. « Le livre de la Genèse est éternel, donc la question d’être dépassé ne se pose même pas ; il nous confie le premier et le dernier mot de notre histoire. Ce qui est certain, c’est que son message n’est pas facile à s’approprier, que sa profondeur ne peut pas être facilement décantée. Celui qui parvient à en détacher les premières couches de son contenu peut considérer avoir obtenu une victoire spirituelle. Les livres sacrés, dont le langage spécifique éclaire notre esprit tout en se soustrayant à notre regard, exigent qu’on les approche avec crainte et prière, déchaussés. Sinon, le plus curieux c’est que ce domaine puisse tout à coup paraître négligeable, dépourvu de contenu, fade, quelconque, glisser entre les doigts et même sentir la mort : la lettre tue. Tandis que l’esprit qui s’en approche purifié, rempli de crainte et d’espérance, puise incessamment à la connaissance des choses d’en haut, des vérités éternelles et toujours nouvelles, authentiques en elles-mêmes. ”[4].

Saint Grégoire de Nysse, en s’adressant à son frère Pierre, évêque de Sébaste, qui lui demandait une explication du livre de la Genèse, insistait sur l’inspiration divine de ce livre. Ne pouvant pénétrer les apparentes contradictions du texte, Pierre demandait à Saint Grégoire de l’initier aux sens cachés et profonds du livre écrit par Moise. Le saint, sous le poids de cette demande, se rend compte que l’explication complète du texte de la Genèse dépasse les capacités humaines. Seuls les Saints Pères, parvenant à le contempler par expérience spirituelle, peuvent apercevoir la vraie signification du texte révélé.

Et il l’avoue: “Que veux-tu de moi, homme de Dieu? Pourquoi me pousses-tu à des choses qui dépassent les forces humaines et qui non seulement sont impossibles à accomplir mais, à mon avis, il est impossible de croire qu’elles pourraient se réaliser de manière irréprochable? Car tu avances ta pensée vers ce que le grand Moise a écrit sous inspiration divine au sujet de la création du monde”[5].

Saint Grégoire de Nysse exprime son profond attachement à la Tradition de l’Eglise pour ce qui est de l’interprétation donnée au texte de la Genèse. Il ne se propose nullement d’en proposer une autre qui donne une orientation différente. Bien plus, en essayant de faire un commentaire à l’Hexaéméron de Saint Basile le Grand, il avoue ne pas vouloir contredire l’interprétation donnée par son frère. Il considère son propre effort exégétique comme une modeste contribution (sans prétention d’être adoptée comme enseignement de l’Eglise) à la tentative d’examiner plus en détail le vaste sujet de la genèse du cosmos.

En conclusion aux considérations que j’ai faites au sujet de l’herméneutique qu’on devrait appliquer au récit de la Genèse, je voudrais marquer le rapport entre le Christ et l’érudition, en faisant appel à un texte magistral de Saint Maxime le Confesseur. J’ai souligné le fait que ce n’est pas tellement une connaissance discursive fondée sur une solide information et une haute capacité analytique qui puisse nous donner la chance de communier aux vérités du mystère de la création, mais plutôt un effort de purifier notre esprit et nos sens, pour être capables de voir la création avec les yeux spirituels de l’esprit.

Le Christ étant Lui-même le Verbe, Il n’a pas besoin de S’énoncer en paroles savantes, mais nous donne la grâce en nous éclairant selon notre capacité de l’accueillir (selon notre effort spirituel de purifier notre esprit). En fait, l’érudition reste à la surface du fond conceptuel de la Sainte Ecriture, sans toucher à la parole divine révélée, qui ne saurait être captée et exprimée par les artifices complexes d’une connaissance discursive, mais seulement par l’intuition de la contemplation propre à ceux habitués à une connaissance directe, simple, éclairée par la grâce divine.

Saint Maxime le Confesseur, dans la scholie au texte évangélique relatant la rencontre entre le Seigneur et la Samaritaine, en donne une interprétation divine: “Le puits de Jacob est l’Ecriture; l’eau, la connaissance de l’Ecriture ; la profondeur du puits, le sens difficile à saisir des mystères de l’Ecriture. Le seau est l’érudition dans l’explication de la parole divine de l’Ecriture, que le Sauveur, étant la Parole même (la Raison), n’avait pas et ne devait pas donner aux fidèles une connaissance acquise par l’étude, mais Il leur donnait la sagesse intarissable issue de la grâce, qui ne tarit jamais en ceux qui en sont dignes. Car le seau, c’est-à-dire l’érudition, ne puise qu’une très petite partie de la connaissance, laissant le tout intacte, puisqu’il ne peut être contenu par aucune parole (par aucune raison). Mais la connaissance selon la grâce contient toute la sagesse permise aux hommes, sans étude, découlant selon les nécessités ”[6].

Par toutes ces précisions, nous avons déjà établi qu’une théologie véridique de la création ne peut être développée qu’à partir d’une herméneutique faite dans l’esprit des Pères. Sans minimiser l’importance de la connaissance scientifique, de l’érudition en général, nous avons vu qu’en perspective patristique, la vue spirituelle donnée par la lumière de la grâce, comme don de Dieu et fruit de l’effort de purification de l’esprit, est essentielle pour pouvoir assumer les mystères profonds de la théologie.

D’autant plus lorsqu’il s’agit d’une théologie de la création, il est important d’avoir en vue cet aspect, car la problématique est extrêmement complexe dans ce domaine et on est tenté (surtout sous l’influence des recherches scientifiques les plus récentes et à cause de l’impact eu par les débats et les polémiques autour de ce thème) de développer de préférence nos propres conceptions, dépourvues de la motivation du bénéfice spirituel, la seule en mesure de légitimer une telle préoccupation.

 

La rationalité du cosmos

La rationalité du cosmos nous révèle le Christ en tant que Verbe Créateur. Il n’ y a rien de toute la création qui reste en dehors de Dieu. Toute partie nous Le montre comme étant son créateur. Mais le Verbe de Dieu est une Personne distincte des raisons du monde, les récapitulant toutes mais étant au-dessus d’elles. Après l’Incarnation du Christ, le cosmos aussi devient plus transparent à refléter la Divinité.

Le Christ, ayant vaincu la corruptibilité de la nature déchue, triomphant de la mort dans Sa chair, S’est fait connaître par tous comme vrai Dieu, montrant la possibilité de la résurrection de toute la création à la vie véritable. Sans s’identifier à la création, mais en étroite liaison avec elle, le Christ S’est révélé être au-dessus de tout, manifestant de cette manière le Père. Par le pouvoir du Fils, nous comprenons Sa vraie relation avec le Père, à l’ombre de la présence du Saint Esprit.

L’expérience de la communion directe de l’homme avec Dieu-l’Homme rend plus visible la présence de Dieu tant dans la nature que dans les autres hommes. C’est l’incarnation qui rend possible cette réalité. “C’est pour cela que le Verbe de Dieu S’est fait chair et S’est servi de l’homme comme d’un organe, pour rendre la chair vivante et, de même qu’Il est connu à travers la création par Ses actes, pour agir en l’homme et Se manifester Soi-même partout, sans laisser rien vide de Sa divinité et de Sa connaissance ”[7].

Saint Maxime le Confesseur voit dans l’Incarnation le mystère caché depuis les siècles, par lequel Dieu S’unit à Sa création. “Celui qui a amené à l’être toute la création visible et invisible rien que par la force de Sa volonté, a eu avant les siècles, donc avant la création du monde, un plan très bon et ineffable à son intention. C’est qu’Il S’unisse Lui-même, sans changement, à la nature humaine, par l’union véritable dans un hypostase et qu’Il unisse à Lui, sans changement, la nature humaine ”[8].

Saint Maxime lie le sens de toute la création au mystère caché depuis les siècles. Ce n’est qu’en assumant le mystère de l’Incarnation avec tout ce que cela suppose (y compris le mystère de la croix et du tombeau) qu’on peut comprendre les raisons divines du monde. En nous élevant jusqu’au mystère de la Résurrection, en faisant l’expérience de ce mystère insondable on pourra saisir la raison profonde des choses créées.

Pour Saint Maxime, au centre du message scripturaire se trouve le mystère de l’Incarnation du Verbe. “Le mystère de l’Incarnation du Verbe recèle la signification de tous les énigmes et les types de l’Ecriture et la science de toutes les créatures visibles et spirituelles. Car celui qui a connu le mystère de la croix et du tombeau a compris les raisons de tout cela et celui qui a connu le sens caché de la Résurrection a connu le but en vue duquel Dieu les a fait toutes ”[9].

La diversité des choses créées indique une multiplicité des raisons selon lesquelles elles furent créées. Ces raisons divines plasticisées dans la création peuvent être contemplées par la raison humaine libérée de la connaissance discursive, séquentielle, qui fragmente la réalité. Une raison purifiée de la divergence des impulsions causées par l’esprit de ce monde parviendra à cette connaissance intuitive, intégrante, qui contienne les raisons divines présentes dans la création. Par ce mouvement, la raison humaine, à partir des raisons des choses de la création, peut s’élever jusqu’à la Raison Une, qui les récapitule toutes.

 

La vision philocalique du monde

Il est obligatoire de renoncer à l’orgueil qui nous fait penser que nous pouvons parler de tout n’importe comment. Une conscience pleine d’humilité nous aide à honorer par le silence beaucoup de choses qui sont supérieures à notre savoir analytique et discursif. La contemplation de la création demande un apophatisme, une expérience du monde comme création de Dieu, à travers laquelle la complexité de l’interrelation des éléments de la création ne peut être abordée par une raison linéaire, quelque sagaces que nos raisonnements puissent être.

Les raisons divines des choses, la relation paradoxale de celles contraires de la création qui assurent en même temps l’unité et la diversité du monde, en gardant les distinctions sans que celles-ci engendrent la séparation, ne peuvent être saisies par une connaissance discursive (même si celle-ci est justifiée par une légitimité académique et par une compétence scientifique). Il existe quelque chose d’intérieur et de profond dans chaque chose, qui ne se laisse pas arracher par l’érudition affichée avec arrogance et autosuffisance. L’idolâtrie des concepts enchaînés en démonstrations nous rend aveugles, nous obligeant de rester extérieurs à la profondeur cachée de la création.

Les Saints Pères ont toujours insisté sur le fait que l’apophatisme de la création doit être la coordonnée principale de nos préoccupations cosmologiques “Car, qui, des grands sages, se fiant aux outils rationnels et se basant sur les preuves qui n’existent pas, pourra, en se servant de la raison, connaître, raconter et faire voir la grandeur de la création? Qui pourra connaître les raisons semées dans chacune des choses depuis le début de leur existence, raisons selon lesquelles chacun a sa nature et a reçu sa forme et son visage et sa composition ?... Qui connaît les raisons des choses telles qu’elles sont et qui se différencient et qui ont une stabilité immuable selon la nature (στασιν εχουσιν άκίνητον την κατα φυσιν) et un mouvement immuable entre elles, en ayant dans le mouvement la stabilité et dans la stabilité le mouvement, chose si surprenante?... En essayant de chercher les raisons de celles-ci ou d’une de celles-ci nous restons entièrement impuissants et muets en ce qui concerne l’explication, n’ayant sur quoi appuyer avec certitude la raison sinon sur le pouvoir divin.“ 254

Le cosmos est unitaire par une co-stabilité des raisons contraires. Les raisons sont distinctes, mais selon leur nature, et elles sont tenues ensemble, en formant le cosmos unitaire. Selon leur nature les raisons sont stables et distinctes, mais elles sont unies par une relation née de leur manière d’agir (τροπος κινεσεος).

Un rapport adéquat à la création nous fait reconnaître la création comme voie de notre avancement vers Dieu, une voie et un partenaire, en même temps, dans le processus de notre déification par la grâce. Le rapprochement avec humilité de la création nous fortifie dans une vie pleine de vertus, car une contemplation des raisons des choses avec piété nous dévoile la vertu que nous pouvons gagner par la chose respective, et l’être des vertus est le Christ.

Celui qui agit dans une telle vie spirituelle atteint, par les vertus acquises à travers les choses, à l’être de la vertu, qui est le Christ. „Celui à qui on a appris à regarder avec piété/humilité les raisons des choses peut développer facilement et d’une toute autre manière le sens de ces idées. Ainsi il n’y aucun étonnement que l’être de la vertu de chacun est la Parole, celle unique, de Dieu. Car l’être de toutes les vertus est Notre Seigneur Jésus Christ même... Car en Lui nous ressuscitons, nous agissons et nous existons. Celui qui ne corrompt pas la raison de son être, pré-existante en Dieu, existe en Dieu, par la garde de sa raison; il agit en Dieu conformément à la raison de son existence éveillée, pré-existante en Dieu, oeuvrant par les vertus, et vit en Dieu selon la raison de son existence éternelle, pré-existante en Dieu.” 259

La contemplation nous donne la véritable signification spirituelle de la création. La vertu acquise par la contemplation inclut également le corps, en se manifestant aussi dans le corps, en montrant ainsi que l’homme entier, corps et âme, est appelé à une vie vertueuse. Mais toute la vertu n’est pas visible dans le corps, car elle est seulement un sceau du pouvoir divin. Par cela nous voyons l’importance du corps, son appel à un mode de vie supérieure. Dans l’âme il y a des disponibilités des vertus, mais elles resteraient inconnues dans la manifestation sans l’existence du corps. Par leur présence dans le corps, les vertus s’ouvrent vers une communauté, elles approfondissent la dimension de l’homme d’être ouvert à la communion.

Le corps devient ainsi un milieu de pleine manifestation de l’esprit, un pont entre l’homme et la création matérielle, par laquelle le corps n’use pas des choses d’une manière humaine, étant dominé par l’avidité, mais il se laisse guider des vertus vers une vie spirituelle qui observe les choses conformément à leurs rationalités divines.

Dans cette interrelation entre les vertus et les raisons des choses par l’intermédiaire du corps nous saisissons le même lien intrinsèque qui existe entre l’homme et le cosmos et leur sens commun supposé par la contemplation: “Celui qui a compris les choses telles qu’elles sont, par l’intuition, avec vraie foi et qui a défini par jugement rationnel leur raison d’une manière judicieuse et juste et qui garde sa raison intègre, a en soi, concentrée, toute la vertu, n’aspirant plus vers rien d’autre après avoir connu la vérité. Il les a toutes traversées avec assiduité, ne mentionnant plus celles qui sont dites appartenir au corps et au monde, ayant dedans, ayant acquis la propriété d’oeuvrer sans effort, car l’intellect a amassé les plus puissantes raisons dépourvues de passions, sur lesquelles toute la vertu et le savoir s’appuient, comme sur des pouvoirs de l’esprit rationnel, qui, pour exister, n’ont en aucun cas besoin du corps, mais pour se montrer, ne refusent pas de s’en servir au moment opportun.” 260    

Le Saint, même s’il contemple le monde sous l’emprise du temps, il dépasse le cadre temporel, se délecte en regardant les rationalités spirituelles du monde, qui sont au-dessus du temps naturel accessible à nos sens. Sans être annulé, le plan naturel est transfiguré. Il est important de souligner que dans toute la dynamique de la déification de la création Saint Maxime n’exclut pas, n’annule pas l’univers visible, par contre il place les vertus et tout le savoir spirituel sur un plan cosmique.

Par les vertus le saint pénètre les ressorts profonds et ultimes de la création bâtie sur la base qui est le Christ, contemplant ainsi une nature transfigurée par leur vie spirituelle. S’enracinant dans une telle vie, épanouie dans les vertus, les saints arrivent à une vision et à un savoir au-dessus de la nature humaine, car ils ne restent pas prisonniers des sens inférieurs des choses, mais ils en montrent la vraie nature et les élèvent à leurs sens iconiques qui dépassent la rélativité du temps que nous vivons.  

Saint Maxime présente dans cette perspective Melchisédech comme le prototype des saints qui a dépassé la nature humaine, comme une icône du Christ qui est l’archétype de tout bien qui se révèle dans chaque saint et de manière accablante chez Melchisédech-porteur des signes du Christ. La vertu exercée par la volonté et par l’oeuvre fortifie le saint qui ne se limite pas au sens utilitariste des choses, mais qui s’élève aux choses éternelles avec son esprit, par la contemplation, montrant en même temps les sens supérieurs des choses, icônes matérialisées, qui renvoient à leurs rationalités archétypales récapitulées dans le Christ.

Melchisédech est un prototype de la sainteté qui, par l’intuition de la vraie vocation de toute la création, reste prêtre dans les siècles, étant dans une conversation éternelle avec Dieu, à travers laquelle il oeuvre pour toute la création. Ainsi on nous dévoile la vocation de l’homme d’être prêtre de la création, s’élevant avec tout le cosmos aux choses supérieures à la nature humaine. Non seulement Melchisédech et les saints sont destinés à une telle mission. Chacun de nous y est appelé. Celui qui vit dans un amour pur pour le Christ va connaître un amour véritable pour ses semblables et pour la création, de telle manière qu’il va dépasser les limites imposées par la nature humaine.

Le mystère profond des choses est inaccessible à un esprit soumis à la fascination des argumentations discursives, des demonstrations analytiques qui ne peuvent pas saisir le caractère vivant de la création, le caractère iconique des choses. Le monde est une icône qui demande à être contemplée et non pas à être expliquée par des lois scientifiques, scrutée par un esprit assoifé de saisir les combustions incandescentes de la matiére déifiée exclusivement du point de vue rationnel. Une raison qui cherche à maîtriser la création par la force d’un esprit qui manque d’évolution spirituelle génère des pensées mortes, enfermées dans les limites de sa propre impuissance, s’interposant ainsi comme une barrière devant une acceptation spirituelle de la création, ouverte à une vision de la présence de Dieu dans le cosmos.  

La contemplation du monde donnée par la vision liturgique sur le cosmos conduit vers une véritable doxologie de la création entière devant son Créateur. „Et toute créature qui se trouve dans le ciel et sur la terre et sous la terre et sous la mer et toutes celles qui sont contenues dans ceux-ci, je les ai entendues dire: Qu’à Celui qui siège sur le trône et Qui est l’Agneau soit la bénédiction et l’honneur et l’adoration et le pouvoir dans tous les siècles!” (Apoc. 5, 13).

 

La doxologie de la création

Un problème sérieux de la théologie contemporaine (surtout dans sa forme académique) est le langage qui exprime les idées exposées. L’incompréhension de la théologie comme doxologie, comme expression de l’acte de prosternement (par excellence doxologique) a mené à la renonciation au langage doxologique, cultique (considéré anachronique et périmé par rapport aux exigences de la théologie académique). On est presque arrivé, dans les cercles spécialisés, à considérer avec emphase et comme un critère d’appréciation positive le fait que plus la problématique théologique (à l’écrit ou à l’oral) est incompréhensible du point de vue de la langue ou du concept pour le large public, plus elle s’approche de la valeur reconnue des recherches faite avec l’acribie scientifique.

Une théologie des concepts qui est fade a perdu la dimension doxologique du langage. Une telle théologie ne peut plus se contenter des choses simples de la vie, elle a perdu le pouvoir de s’étonner devant le spectacle de la vie, elle ne peut plus vivre l’étonnement du fait que Dieu est supérier à la création. Or, ce qui était essentiel dans la théologie véritable des Saints Pères, était la disposition de l’âme de louer le Seigneur, d’adorer Dieu, disposition permanente, vécue pendant la diversité des activités quotidiennes. Tout d’abord le chrétien est un être doxologique qui a la vocation de transformer son coeur en un autel d’où jaillissent ses pensées et ses sens transfigurés et dédiés, consacrés à Dieu. Vivre sans louer Dieu pour tout et en tout lieu signfie vivre comme un mort. L’absence de la doxologie est la mesure de notre mort spirituelle.

Le langage doxologique peut et doit être valorisé notamment dans une théologie de la création. La dimension iconique de la création demande d’être transposée dans un langage adéquat qui revendique le sens profond de la chose qui ne peut être aperçue que par l’oeil intérieur de la foi. La vision symbolique que l’homme religieux a du cosmos n’est pas étrangère au vrai chrétien. La présence des symboles partout dans le monde nous montre que le monde est une création de Dieu.

Le Saint Évangile contient de nombreux textes qui accentuent la doxologie de la création entière face à Dieu. Le Psaume 148 est une vraie hymne doxologique:

 

“Lăudaţi pe Domnul din ceruri, lădaţi-L pe El întru cele înalte

…………………………………………………………………

Lăudaţi-L pe El soarele şi luna, lăudaţi-L pe El toate stelele şi lumina.

Lăudaţi-L pe El cerurile cerurilor şi apa cea mai presus de ceruri

……………………………………………………………………

Lăudaţi pe Domnul toate cele de pe pământ: focul, grindina, zăpada,

gheaţa, viforul, toate îndepliniţi cuvântul Lui…..”(Ps. 148, 1, 3, 4, 7, 8).

 

Je ne vais pas présenter d’autres textes évangéliques qui soulignent le caractère doxologique de la création, mais je vais citer quelques exemples des textes liturgiques pour montrer que la vision liturgique, philocalique et eucharistique du monde se concrétise par une grandiose doxologie de la création apportée à son Créateur.

À travers les textes de la Sainte Liturgie on peut remarquer le caractère eucharistique de la création et le fait que le Christ, comme Archevêque Qui fait le sacrifice et comme Sacrifice offert au Père, car par ce sacrifice il récapitule toute la création, est invoqué comme Seigneur de toute la création. Dans (anaforaua) le prêtre invoque Dieu comme „

“…Stăpâne al tuturor, Doamne al cerului şi al pământului şi a toată făptura cea văzută şi nevăzută, Cel ce şezi pe scaunul slavei şi priveşti adâncurile, Cel ce eşti fără de început, nevăzut, neajuns, necuprins, neschimbat…”.280

 

În continuare voi prezenta câteva texte selectate de la slujbele legate de praznicele împărăteşti şi care evidenţiază caracterul doxologic al creaţiei.

  • Praznicul Naşterii Domnului

La utrenia din 23 decembrie:

“Tot pământul se veseleşte văzând pogorârea lui Dumnezeu; magii aduc daruri, cerul prin stea se face ascultat; îngerii slăvesc; păstorii petrecând noaptea pe câmp se minunează; ieslea Te primeşte, ca un scaun în chipul focului; bucură-te, Maică, văzând acestea”.291 Ή γέ πάσα βλεπουσα …ουρανος φθέγγεται…αγγελοι δοξάςουσι…ποιμένες θαυμάςουσι…Мήτερ βλέουσα.292

La vecernia din 24 decembrie: “Ascultă cerule şi ia aminte pământule, că iată Fiul şi Cuvântul lui Dumnezeu merge să se nască din Fecioara care nu ştie de bărbat, cu bunăvoinţa Celui ce L-a născut fără patimă şi cu împreună lucrarea Sfântului Duh. Betleeme pregăteşte-te; deschide-ţi poarta Edenule, că Cel ce este de-a pururea Se face ceea ce nu a fost şi Ziditorul a toată făptura, Care dă lumii mare milă, Se naşte”.293 Ακουε ούρανέ καί ενωτιςου ή δη…294 Adresarea se face către un cosmos însufleţit. Verbele prin imperativul bucuriei exprimă acest lucru.

Je vais vous présenter maintenant quelques textes séléctés des offices liés aux fêtes royales et qui mettent en évidence le caractère doxologique de la création.

“Ascultă cerule şi ia aminte pământule, că iată Fiul şi Cuvântul lui Dumnezeu merge să se nască din Fecioara care nu ştie de bărbat, cu bunăvoinţa Celui ce L-a născut fără patimă şi cu împreună lucrarea Sfântului Duh. Betleeme pregăteşte-te; deschide-ţi poarta Edenule, că Cel ce este de-a pururea Se face ceea ce nu a fost şi Ziditorul a toată făptura, Care dă lumii mare milă, Se naşte”.293 Ακουε ούρανέ καί ενωτιςου ή δη…294 Adresarea se face către un cosmos însufleţit. Verbele prin imperativul bucuriei exprimă acest lucru.

La Fête de la Nativité

Pendant les matines du 23 décembre:

“Tot pământul se veseleşte văzând pogorârea lui Dumnezeu; magii aduc daruri, cerul prin stea se face ascultat; îngerii slăvesc; păstorii petrecând noaptea pe câmp se minunează; ieslea Te primeşte, ca un scaun în chipul focului; bucură-te, Maică, văzând acestea”.291 Ή γέ πάσα βλεπουσα …ουρανος φθέγγεται…αγγελοι δοξάςουσι…ποιμένες θαυμάςουσι…Мήτερ βλέουσα.292

Pendant les vêpres du 24 décembre:

“Ascultă cerule şi ia aminte pământule, că iată Fiul şi Cuvântul lui Dumnezeu merge să se nască din Fecioara care nu ştie de bărbat, cu bunăvoinţa Celui ce L-a născut fără patimă şi cu împreună lucrarea Sfântului Duh. Betleeme pregăteşte-te; deschide-ţi poarta Edenule, că Cel ce este de-a pururea Se face ceea ce nu a fost şi Ziditorul a toată făptura, Care dă lumii mare milă, Se naşte”.293 Ακουε ούρανέ καί ενωτιςου ή δη…294

On s’adresse à un cosmos vivant. Les verbes à l’impératif, exprimant la joie, soulignent cette idée .

  • Botezul Domnului

La vecernia din 5 ianuarie: “Arătându-Te în trup Tu, pământul s-a sfinţit, apele s-au binecuvântat, cerul s-a luminat, iar neamul omenesc s-a izbăvit de amara tiranie a vrăjmaşului”.310

“Pământul s-a sfinţit cu sfântă naşterea Ta, Cuvinte, cerurile cu stelele vestind slava Ta. Iar acum firea apelor se binecuvintează, botezându-Te Tu cu trupul; şi neamul celor pământeşti s-a suit iarăşi la starea cea dintru început”.311

“Să se bucure tot pământul, cerul să se veselească, lumea să salte; izvoarele şi lacurile, adâncurile şi mările împreună să se bucure; că Hristos vine să curăţească pe Adam şi să-l mântuiască cu dumnezeiescul botez”.312

Le Baptême du Seigneur :

Pendant les vêpres du 05 janvier:

“Arătându-Te în trup Tu, pământul s-a sfinţit, apele s-au binecuvântat, cerul s-a luminat, iar neamul omenesc s-a izbăvit de amara tiranie a vrăjmaşului”.310

“Pământul s-a sfinţit cu sfântă naşterea Ta, Cuvinte, cerurile cu stelele vestind slava Ta. Iar acum firea apelor se binecuvintează, botezându-Te Tu cu trupul; şi neamul celor pământeşti s-a suit iarăşi la starea cea dintru început”.311

“Să se bucure tot pământul, cerul să se veselească, lumea să salte; izvoarele şi lacurile, adâncurile şi mările împreună să se bucure; că Hristos vine să curăţească pe Adam şi să-l mântuiască cu dumnezeiescul botez”.312

La slujba aghiasmei celei mari: “Astăzi firea apelor se sfinţeşte şi se desparte Iordanul şi îşi opreşte curgerea apelor sale, văzând pe Stăpânul botezându-Se”.314

Pendant l’office de la bénédiction des eaux:

“Astăzi firea apelor se sfinţeşte şi se desparte Iordanul şi îşi opreşte curgerea apelor sale, văzând pe Stăpânul botezându-Se”.314

La aceeaşi slujbă se rosteşte de către preot rugăciunea făcută de Sofronie, patriarul Ierusalimului. În această rugăciune întâlnim un pronunţat caracter doxologic al creaţiei: “Mare eşti Doamne, şi minunate sunt lucrurile Tale, şi nici un cuvânt nu este de ajuns spre slava minunilor Tale. Că Tu, cu voia Ta, pe toate le-ai adus dintru nefiinţă întru fiinţă. Cu puterea Ta ţii făptura şi cu purtarea Ta de grijă chiverniseşti lumea. Tu din patru stihii ai întocmit făptura şi cu patru vremi ai încununat curgerea anului. Pe Tine te laudă soarele. Pe Tine te slăveşte luna. Ţie se supun stelele. Pe Tine te ascultă lumina. De Tine se îngrozesc adâncurile. Ţie slujesc izvoarele. Tu ai întins cerul ca un cort. Tu ai întărit pământul peste ape. Tu ai îngrădit marea cu nisip. Tu ai revărsat aerul spre răsuflare”.315

Pendant le même office le prêtre dit la prière de Sophrony, le patriarche de Jérusalem. Dans cette prière il y a un caractère doxologique de la création très prononcé.

“Mare eşti Doamne, şi minunate sunt lucrurile Tale, şi nici un cuvânt nu este de ajuns spre slava minunilor Tale. Că Tu, cu voia Ta, pe toate le-ai adus dintru nefiinţă întru fiinţă. Cu puterea Ta ţii făptura şi cu purtarea Ta de grijă chiverniseşti lumea. Tu din patru stihii ai întocmit făptura şi cu patru vremi ai încununat curgerea anului. Pe Tine te laudă soarele. Pe Tine te slăveşte luna. Ţie se supun stelele. Pe Tine te ascultă lumina. De Tine se îngrozesc adâncurile. Ţie slujesc izvoarele. Tu ai întins cerul ca un cort. Tu ai întărit pământul peste ape. Tu ai îngrădit marea cu nisip. Tu ai revărsat aerul spre răsuflare”.315

  • Praznicul Schimbării la faţă a Mântuitorului

“Să se bucure cerul, mai înainte simţind pe Soarele cel neapus, răsărind acum din pământ în Muntele Taborului, vrând să acopere cu dumnezeiască slavă razele soarelui. Şi pământul să dănţuiască luminat, cu cerească rază şi cu lumină strălucind, şi lumină făcându-se”.321

La Fête de laTransfiguration du Christ

“Să se bucure cerul, mai înainte simţind pe Soarele cel neapus, răsărind acum din pământ în Muntele Taborului, vrând să acopere cu dumnezeiască slavă razele soarelui. Şi pământul să dănţuiască luminat, cu cerească rază şi cu lumină strălucind, şi lumină făcându-se”.321

  • Praznicul Învierii Domnului

“Acum toate s-au umplut de lumină: şi cerul şi pământul şi cele de desubt. Deci să prăznuiască toată făptura Învierea lui Hristos, întru Care s-a întărit”.323

“Cerurile după cuviinţă să se veselească şi pământul să se bucure. Şi să prăznuiască toată lumea cea văzută şi cea nevăzută; că a înviat Hristos, bucuria cea veşnică”.324 ούρανοί μέν επαξίως εύφραινεσθωσαν, γή δέ άγαλλιάσθω, έορταςετω δέ κόσμος, όρατός τε άπας καί άορατος.325

La Fête de la Resurrection du Seigneur

“Acum toate s-au umplut de lumină: şi cerul şi pământul şi cele de desubt. Deci să prăznuiască toată făptura Învierea lui Hristos, întru Care s-a întărit”.323

“Cerurile după cuviinţă să se veselească şi pământul să se bucure. Şi să prăznuiască toată lumea cea văzută şi cea nevăzută; că a înviat Hristos, bucuria cea veşnică”.324 ούρανοί μέν επαξίως εύφραινεσθωσαν, γή δέ άγαλλιάσθω, έορταςετω δέ κόσμος, όρατός τε άπας καί άορατος.325

 

Conclusion

La dimension eschatologique de la théologie est présente dans la cosmologie chrétienne, elle est emblématique pour la conception orthodoxe du cosmos. Par le fait que la doctrine chrétienne affirme l’existence d’un début du monde et d’une fin du monde (compris comme transfiguration) on dépasse une conception cyclique du temps, spécifique aux philosophies et aux religions panthéistes. L’Ecriture commence avec le récit de la création du ciel et de la terre et finit avec la prophétie d’un nouveau ciel et d’une nouvelle terre. C’est de cette manière que l’eschatologie est possible, en dépassant autant une conception exclusivement linéiare du temps (une simple succession de secondes à l’horizontale de la création) qu’une cyclicité du temps, le christianisme proposant une spirale du temps, un temps ouvert vers l’éternité, mais une étérnité qu’on peut anticiper hic et nunc.

La Sainte Liturgie qui commence avec l’ecfonis doxologique du Royaume de la Sainte Trinité marque l’atmosphère eschatologique de la Sainte Liturgie. A travers la Sainte Liturgie nous vivons le renouvellement et la transfiguration de la création. L’expérience de la vie liturgique nous assure que le monde dans lequel nous vivons est un monde liturgique où rien de ce que nous rencontrons ne se résume à l’aspect visible. Dans la Sainte Liturgie toute la création est articulée autour de la réalité de la Croix et de la Resurrection, le monde entier participant ainsi à une liturgie qui exprime la vocation de l’union du visible avec l’invisible.

Le témoignage pendant la Sainte Liturgie „...J’ai vu la vraie Lumière, j’ai reçu la Grâce Divine, j’ai trouvé la vraie foi, de l’indivisible Sainte Trinité, en nous prosternant, car Celle-ci nous a sauvés” 476 est une preuve certe de la transfiguration de la vie du croyant. Même si nous vivons dans ce monde, nous aspirons d’une manière eschatologique vers le royaume de Dieu et nous témoignons la présence transfiguratrice du Royaume dès maintenant, intensément vécue pendant la Sainte Liturgie.

L’iconographie de l’eglise constitue un témoignage éloquent du monde transfiguré qui dépasse la fragmentation du siècle présent et s’imprègne du pouvoir unificateur de la Sainte Liturgie. Par l’iconographie liturgique nous actualisons une communion avec Le Christ et avec les saints. C’est un présent qui récapitule le passé et offre une nouvelle signification à l’avenir. Pendant la Sainte Liturgie nous prions Dieu: „A ta Cène mystique reçois-moi, aujourd’hui, Fils de Dieu!” 478.

L’actualisation permanente de la communion avec le Christ détermine le croyant à avoir une vision profonde du monde. Non seulement sa vie est renouvelée, mais toute la création est appelée à un nouvel ordre de l’existence. „L’espace du monde est transfiguré: il n’y a plus de perspective qui place l’homme dans la position d’un spectateur extérieur. Le croyant, l’adorateur, est invité aux noces. Il se trouve à l’intérieur. Il voit tout le monde du dedans. L’histoire est interprétée différemment. Les événements de la sagesse divine ne sont pas passés et révolus, mais présents et actifs. Ils nous embrassent, ils nous sauvent. Dans l’icône il n’y a plus une fidélité historique neutre, mais une transformation liturgique dynamique. Dans l’iconographie les événements du salut ne sont pas interprétés de manière historique, mais sont initiés dans les mystères incorporés à la Liturgie; ils s’interpénètrent réciproquement. Ils deviennent un témoignage d’une autre vie, éternelle, qui a rompu tout attachement à la déchéance. Ils nous invitent à un festin spirituel. Ici et maintenant.” 479

 

 

 

[1] Ibidem, p. 18.

[2] Pierre Damascène, Despre a şasea cunoştinţă, Filoc. 5, EIMBOR, Buc., 1976, p.106-107

[3] S. Jean Chrysostome, Omilii la Facere, EIBMBOR, collection PSB, vol.21, Bucarest, 1987, p. 40

[4] Jean Kovalevsky, Taina originilor, Ed. Anastasia, Bucarest, 1996, p. 17

[5] S. Grégoire de Nysse, Cuvânt apologetic la Hexaimeron, EIBMBOR, collection PSB, vol. 30, Bucarest, 1998, p. 92

[6] S.Maxime le Confesseur, Răspunsuri către Talasie, Filocalia, vol. 3, Ed. Harisma, Bucarest, 1994, p. 157

[7] S. Athanase le Grand, Despre Întruparea Logosului, p. 142

[8] S. Maxime le Confesseur, Răspunsuri către Talasie, p. 82

[9] Idem, Capete despre dragoste, p. 167

 

254 Sf. Maxim Mărturisitorul, Ambigua, p. 204-205; PG, volumul 90, p. 1228

259 Sf. Maxim Mărturisitorul, Ambigua, p. 85-86

260 Ibidem, p. 107

280 Liturghier, EIMBOR, Bucureşti, 2000, p. 226

291 Mineiul pe Decembrie, p. 336

292 Μιναιον του Δεκεμβριον, p. 438

293 Mineiul pe Decembrie, p. 339

294 Μιναιον του Δεκεμβριον, p. 442

293 Mineiul pe Decembrie, p. 339

294 Μιναιον του Δεκεμβριον, p. 442

291 Mineiul pe Decembrie, p. 336

292 Μιναιον του Δεκεμβριον, p. 438

293 Mineiul pe Decembrie, p. 339

294 Μιναιον του Δεκεμβριον, p. 442

310 Ibidem, p. 84

311 Ibidem, p. 87

312 Ibidem, p. 87

310 Ibidem, p. 84

311 Ibidem, p. 87

312 Ibidem, p. 87

314 Ibidem, p. 129

314 Ibidem, p. 129

315 Molitfelnic, EIBMBOR, Bucureşti, 1998, p. 585

315 Molitfelnic, EIBMBOR, Bucureşti, 1998, p. 585

321 Mineiul pe August, p. 62

321 Mineiul pe August, p. 62

323 Ibidem, p. 16

324 Ibidem, p. 16

325 Πεντικοςταρ, Αποστολική Διακονια, Atena, 1990, p. 2

323 Ibidem, p. 16

324 Ibidem, p. 16

325 Πεντικοςταρ, Αποστολική Διακονια, Atena, 1990, p. 2

476 Liturghier, EIMBOR, 1995, p. 171

478 Liturghier, p. 180

479 Arhim. Vasilios, op. cit. , p. 82